Arrêts de travail auto-déclarés, « On marche sur la tête »

Plongez dans l’univers des arrêts de travail auto-déclarés, une pratique controversée qui fait débat. Entre flexibilité et abus, la frontière semble parfois mince. Décryptage d’une tendance qui interroge notre rapport au travail et à la responsabilité.

Imaginez pouvoir vous mettre en arrêt de travail avec une simple auto-déclaration, sans passer par un médecin. Cette proposition de la Cour des comptes, sur les arrêts de travail auto-déclarés, pourrait révolutionner le quotidien des employés et des entreprises. Mais pour certains, c’est comme si on marchait sur la tête.

Libérer du temps pour les médecins

La motivation première derrière cette idée est de soulager les médecins des consultations inutiles. Frédéric Valletoux, ministre délégué en charge de la Santé, estime que ces auto-déclarations permettraient aux praticiens de se concentrer sur les cas urgents. S’exprimant sur TF1 le 14 mai 2024, il a souligné l’importance de discuter cette mesure avec les réseaux patronaux pour optimiser le temps médical disponible.

Cette solution n’est pas inédite. Le Royaume-Uni, la Norvège, la Suède et la Belgique ont déjà adopté des systèmes similaires pour les arrêts de courte durée. Au Royaume-Uni, un arrêt de moins de sept jours peut être auto-certifié via un formulaire. Ces pays n’ont pas observé d’abus notables et ont réalisé des économies conséquentes sur les coûts de la santé.

Entre opportunité et crainte des dérives

Toutefois, cette proposition suscite des inquiétudes chez les employeurs. Le Medef et la CPME redoutent une augmentation des arrêts de travail injustifiés. Plusieurs mesures sont envisagées pour limiter les abus, notamment des jours de carence qui ne seraient indemnisés ni par la Sécurité sociale ni par les entreprises. La CPME suggère également de plafonner les arrêts auto-déclarés à sept jours par an et d’interdire l’accumulation de congés payés durant ces périodes. Eric Chevée de la CPME insiste sur la nécessité de mettre en place des garde-fous stricts.

Conséquences financières et climat de confiance

Si cette mesure simplifie la vie des salariés, elle comporte aussi des implications financières. Actuellement, les trois premiers jours d’arrêt de travail sont pris en charge par 61 % des entreprises. Mais avec les jours de carence proposés, les salariés pourraient subir une perte financière en cas d’auto-déclaration. Benoît Serre de l’ANDRH (Association nationale des directeurs des ressources humaines) craint que cela ne crée une “relation du soupçon” entre employeurs et salariés, compromettant ainsi le climat de confiance nécessaire à une bonne ambiance de travail.

Les exemples étrangers montrent que ces systèmes peuvent fonctionner. Au Royaume-Uni, un formulaire suffit pour auto-certifier un arrêt de moins de sept jours. Aucun abus notoire n’a été observé selon Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes. Ces modèles permettent aussi des économies substantielles sur les coûts de la santé, ce qui pourrait être un argument de poids pour l’adoption de cette mesure en France.

Les voix discordantes

Malgré ces points positifs, le débat continue de diviser. Beaucoup craignent une explosion des arrêts surévalués et une dégradation du lien de confiance au sein des équipes. La question de l’équilibre entre simplification administrative et prévention des abus reste au cœur des discussions.

Il semble donc que cette proposition, bien que prometteuse sur le papier, nécessitera de nombreux ajustements et discussions entre les différents acteurs impliqués pour trouver un terrain d’entente viable.

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